vendredi 31 mai 2013

Et revoici ˮ SUDtamtam ˮ !





Cela faisait bien deux longues années que nous avions déserté la blogosphère. Pire, il s’en est même fallu de peu que ce blog meure de sa belle mort… Cet article-ci ne rompt pas seulement le silence mais en également marque notre retour et rappelle notre détermination d’être présent semaine  après semaine.


Les migrations, qu’elles soient forcées ou volontaires, sont absolument l’une des caractéristiques de notre époque. D’après un rapport de l’ONU publié en 2010, environ ˮ 214 millions d’habitants, soit 1/3 de la population mondiale, vivait hors de son pays d’origine ˮ ![i] C’est dire l’ampleur du problème.    

 
D’ailleurs, tant que les pays continueront à se faire la guerre et les ethnies au sein d’une même nation à se regarder en chien de faïence ; tant que les économies d’Afrique et d’ailleurs continueront leur chute et que les libertés publiques ne cesseront pas d’être bâillonnées par ceux-là même sensés les préserver, les gens seront toujours sur la route, à la recherche qui d’un abri sur, qui du mieux-être ailleurs que chez eux, ou simplement pour un exotisme. Et pour ce fait, les flux migratoires resteront d’actualité, ne serait-ce que suite aux difficultés créées par l’insuffisance des ressources dans le pays hôte…


Le rd congolais moyen, qu’il vive au pays ou non, y est impliqué au quotidien d’une façon ou d’une autre. D’abord nombreux sont ceux de nos compatriotes qui ont des parents ou connaissances vivant  en dehors de la RDC. Ensuite, il y en a aussi beaucoup, qu’ils soient à Kinshasa, Lubumbashi, ou Goma par exemple, attendent anxieusement les fins du mois afin de recevoir les subsides ou transfert d’argent de l’étranger. Et puis, combien ne rêvent-ils pas de faire à leur tour un jour leurs valises et de s’en aller, allongeant ainsi la liste des émigrés congolais ?


Ces raisons et d’autres encore expliquent pourquoi les mouvements des populations hors des frontières retiennent notre attention et justifient  un tant soit peu l’existence de ce blog. Le plus régulièrement possible, nous comptons vous tenir au courant de ces faits qu’ils soient tirés de la presse internationale (et traduits par nous) ou rédigés par nous-même.


Comment ne pas vous  recommander l’excellent dossier publié dans le périodique ˮ Réveillez-vous ! ˮ de février 2013 avec ce titre : ˮ Emigration, rêves et réalités ˮ ?


En attendant, nous nous réjouissons d’être de retour et vous souhaitons la bienvenue ici !


SUDtamtam



[i]  Migration, a world on the move: population & development sur www.unfpa.org

jeudi 22 décembre 2011

Ce qui freine la scolarisation des migrants au pays de Mandela


Fidèle à sa vocation, le Centre pour les Droits d’Education et Transformation de l’Université de Johannesburg a publié il y a peu une brochure intitulée "Les droits d’éducation des refugiés et migrants", fruit d’une année de recherche sur les droits à l’éducation des migrants vivant en Afrique du Sud. Elle était menée dans les provinces de Gauteng, le Limpopo ainsi que le Western Cape sous forme d’interviews des élèves et parents d’élèves.

 Dans une livraison précédente, nous avions introduit l’intéressante étude d’après une traduction de l’article de l’hebdomadaire d’investigation "Mail & Guardian" de Johannesburg et indiqué de façon liminaire certains détails s’y rapportant. Cette fois,  nous en publions la suite où il est énuméré les cinq facteurs que les auteurs de la recherche présentent comme faisant obstacle à un accès facile aux institutions d’enseignement par les enfants des parents demandeurs d’asile, migrants ou refugiés en Afrique du Sud.

Manque de prise de conscience de leurs droits
La plupart de parents immigrés interrogés par les chercheurs n’étaient pas conscients de leurs droits à l’éducation. Quant à ceux qui en étaient déjà informés, ils ignoraient cependant toute procédure pour les réclamer ou comment entrer en contact avec des organisations qui pouvaient les aider à parvenir à leurs fins. Il faut dire que les responsables des écoles ne les aident pas non plus.

 Fait intéressant, tous les participants à la recherche se sont montrés disposés à en apprendre davantage sur leurs droits, avec un bémol car la majorité manifestaient une certaine réticence, suggérant que même dans le cas où ils étaient bien au fait de la loi sur l’éducation, ils n’étaient pas sûrs que le gouvernement local tenait autant qu’il était écrit à ce que les immigrés aient droit réellement à un enseignement gratuit. 

L’obstacle financier
En Afrique du Sud, les demandeurs d’asile et migrants n’ont pas seulement le droit d’avoir accès aux soins de santé dans des hôpitaux et cliniques, ou aux ARVs pour les malades de SIDA. Ils ont également le droit à une éducation gratuite.

La loi qui régit l’éducation dans le pays, le National Education Policy Act de 1996 stipule qu’aucun enfant "ne devrait être suspendu de l’école, ni se voir refuser la participation aux activités sportives ou culturelles, se voir refuser l’octroi d’un bulletin ou la carte de transfert, ou même culpabilisé, simplement puisque ses parents ne disposent pas ou ne peuvent pas lui payer les frais scolaires". Le même document recommande aux directeurs d’écoles et leurs administrations d’informer tous les parents au sujet du droit qui est le leur de solliciter  ou non l’exemption des frais scolaires.
                                                                                                   
Au vu du travail  mené par les chercheurs dans le passé, l’obstacle financier apparait comme le principal frein contre l’accès des enfants des migrants aux institutions d’enseignement en Afrique du Sud. A ce sujet, une étude datant de 2003 avait déjà établie que 26% des enfants des migrants du primaire et 39% du secondaire ne fréquentaient pas l’école à cause du manque de frais scolaires.

Il faut reconnaitre que cette situation se justifie aussi parce que nombreux ignorent la loi, ce qui entretemps permet aux écoles de percevoir le plus d’argent possible. Mais ce qui préoccupe les chercheurs actuellement, c’est de faire une évaluation depuis l’introduction du système d’exemption.

En réalité, les chercheurs ont trouvé que certains refugiés recevaient des lettres de menaces pour des créances non honorées envers les écoles, ce qui avait pour conséquence de les conduire à vivre dans la psychose d’être soit traduits en justice, soit de voir leurs enfants chassés de l’école,  ou pire, de se voir eux-mêmes expulsés du pays. Il est des cas où certains enfants restaient chez-eux pour aider les parents pendant toute une année, histoire de permettre à ceux-ci de réunir de quoi supporter la scolarité pour l’année suivante.

Même dans le cas où les refugiés étaient capables  d’obtenir cette exemption, il existait toujours des difficultés à cause de l’inhibition d’être considéré comme bénéficiaire de l’aide gouvernementale. Beaucoup de parents refugiés ont reconnu se sentir gênés ou même honteux à la seule pensée de pouvoir solliciter et bénéficier d’une telle aide.  Les enfants qui en bénéficient pour leur part sont souvent victimes de moquerie de la part de leurs collègues à l’école.

 L’attitude des autorités scolaires n’est pas pour arranger les choses, soit  lorsqu’ils refusent de distribuer les formulaires d’exemption des frais scolaires au sein de leurs écoles, soit en affichant leur désapprobation aux parents qui en sollicitaient.

 La xénophobie et la culture
On a tort de considérer les refugiés comme un groupe homogène, car des nombreux rapports des chercheurs ont jeté la lumière sur la diversité représentée par les facteurs que sont le langage, la nationalité, la classe sociale, la religion et la culture.

On a rapporté que des élèves avaient été illégalement chassés des écoles au motif qu’ils ne parlaient pas l’Anglais. Dans la province de Limpopo par exemple, la plupart de migrants s’expriment en Ndebele et Shona ou Xitsonga [langues parlées au Zimbabwe] tandis que les langues d’instruction dans les écoles  étaient le Tshivenda, le Sotho du Nord ou le Xitsonga.  Tout élève trouvé en train de s’exprimer dans sa langue maternelle était puni.  Dans ces conditions, il était difficile aux parents [puisqu’ils ne parlaient pas les langues locales, lesquelles étaient les langues d’enseignement], d’aider leurs enfants à faire des devoirs scolaires.
                                
"Les enseignants refusent de nous expliquer les matières en parlant lentement ou préfèrent le faire en Zulu ou Sotho", avait déclaré Angela (pas son vrai nom), un élève issu d’une famille de 7 enfants et qui vit avec ses parents dans un appartement à deux chambres à coucher dans un faubourg de Johannesburg. "Certains enseignants se plaignent des étrangers qui seraient nombreux dans leurs écoles", a dit Angela aux chercheurs.

La xénophobie pose parfois des problèmes de sécurité lorsque les élèves, pour se rendre dans des écoles, empruntent les taxis ou les trains. Les chercheurs ont indiqué que dans certaines écoles de la province de Gauteng, les élèves Somaliens étaient victimes de discrimination de la part des enseignants ou d’autres personnes qui se moquaient d’eux puisqu’ils portaient le voile. Une jeune fille vivant au Limpopo était surnommée "sorcière" et "prostituée" par son enseignant "puisque tous les Zimbabwéens le sont". Un autre élève dans une école de Musina a dit que les autres enfants ne voulaient pas jouer avec lui "puisque les Zimbabwéens puent".

De toute évidence, les parents migrants se sentent incapables d’influer en quoi que ce soit sur les autorités scolaires des écoles que fréquentent leurs enfants. Un tuteur de deux enfants finalistes du secondaire exprimait des doutes quant à la qualification de certains des enseignants  des enfants dont il assurait la garde. Il n’était pas non plus satisfait du programme scolaire. Mais lorsque les chercheurs lui ont demandé interrogé comment il escomptait résoudre le problème, il a déclaré : "En tant que migrant, il  n y a rien que nous puissions faire. Où pourrions-nous aller nous plaindre ? Qui pourrait nous écouter ?"

Le "cauchemar" des papiers
Les enfants nés des immigrants en Afrique du Sud sont supposés avoir les mêmes droits que les sud-africains de naissance, celui à l’éducation compris. Mais pour jouir de ce droit, les enfants doivent brandir une attestation de naissance valide.

La plupart d’écoles exigent la présentation d’attestation de naissance avant l’inscription. Théoriquement, un Permis de demandeur d’asile (section 22) est suffisant pour permettre aux parents de solliciter ce document au bureau du Home Affairs (ministère de l’intérieur local) pour leurs enfants. Mais l’étude montre qu’en réalité ces Permis ne sont pas acceptés au Home Affairs, situation qui rend difficile l’inscription des enfants à l’école.  

"J’ai tenté par tous les moyens d’obtenir un certificat de naissance en vain", a dit une mère de famille zimbabwéenne qui vit en Afrique du Sud depuis 2003. "Je dispose d’un Permis de demandeur d’asile mais ils [Home Affairs] disent qu’ils ne peuvent pas en établir pour moi car je ne dispose pas d’un passeport sud-africain. Ils m’ont prié d’aller en chercher au Zimbabwe".

La recherche suggère que l’importance accordée à la présentation de l’attestation de naissance ainsi que l’exigence faite aux élèves de postuler une année auparavant comme condition pour être inscrit dans une école, sont des moyens d’écarter systématiquement les enfants migrants des institutions scolaires et l’établissement des notions de "celui qui a"  et "celui qui n’a pas".

Presque tous les migrants interrogés dans l’étude ont reconnu rencontrer des difficultés dans l’obtention des documents au Home Affairs. L’une des interviewée indique qu’elle tente sans succès depuis dix mois d’obtenir la prorogation du Permis. A présent, le délai est dépassé, ce qui lui a valu de passer quelques jours en prison, laissant ses enfants sans surveillance. "Ne pas disposer des papiers en règle en Afrique du Sud, c’est ne pas jouir de ses droits humains", a écrit le chercheur Mackay. "Personne ne peut étudier, se faire soigner ou même ouvrir un compte en banque sans le Permis de demandeur d’asile".

Mais la situation est plus difficile encore pour les mineurs non accompagnés. Ceux-ci doivent faire des tours entre les ministères des affaires sociales et Home Affairs. Présenter les examens des humanités (matric) est difficile aussi. Un jeune de 19 ans qui vit au Limpopo s’est vu notifié par son école de présenter un passeport sud-africain s’il tenait à présenter les examens de fin d’année. Il a du souci à se faire. Le Home Affairs lui dit qu’il ne peut lui établir un passeport sud-africain puisqu’il n’en a pas la nationalité. Le centre pour mineurs non accompagnés qui l’héberge lui demandera bientôt de voir ailleurs étant donné qu’il a dépassé l’âge requis pour y habiter (18 ans).

Certains refugiés ont perdu maisons et écoles dans le feu, tandis que d’autres parmi eux ont échappé à des conditions de guerre ou de guerre civile. Toutes ces conditions ne permettent pas de disposer des bulletins originaux ni de  demande de transfert exigés dans des écoles sud-africaines.

Si l’on se réfère à la disposition relative à l’inscription des élèves dans des écoles publiques, les directeurs d’écoles devraient aider les parents d’obtenir les documents s’ils ne sont pas en leur possession, mais entretemps l’élève pouvait être pris sous conditions. Dans un délai de trois mois, si le document n’était toujours pas disponible, l’administration de l’établissement où étudie l’enfant, en consultation avec les officiels du district, devraient s’enquérir du problème.

Conformément à la loi locale, même un élève dont le statu légal rester à déterminer (puisque sans papiers valides) peut toujours se faire inscrire dans des écoles publiques si un parent ou tuteur peut fournir une preuve attestant qu’une demande des documents légaux a été faite auprès des autorités compétentes [Home Affairs] pour rester dans le pays. L’étude indique que ces procédures n’étaient pas respectées mais plutôt violées.

L’application des recommandations gouvernementales rencontre beaucoup d’obstacles dans les trois sites étudiés (Gauteng, Limpopo et Western Cape). Un refugié vit en Afrique du Sud depuis 13 ans sans obtenir ni de résidence ni de nationalité, ce auxquelles il a droit après 5 ans, selon la loi. "A la seule pensée de mener les démarches pour renouveler mon statu de refugié et celui de ma famille me stresse et me donne des cauchemars", a-t-il avoué aux chercheurs.

Des nombreux rapports indiquent que les agents de Home Affairs intimidaient les refugiés au point que les usagers préféraient "plutôt garder le silence que provoquer la colère des agents".

Ce qui est frappant est que tous les chercheurs reconnaissent que la xénophobie provient de la perception selon laquelle les migrants prennent les emplois destinés aux citoyens du pays, gagnent plus d’argent et contribuent à la hausse de la criminalité. Cependant, les groupes de chercheurs ont découvert que les refugiés recourent peu aux services sociaux et la plupart sont jeunes et motivés au travail, créent même les emplois et apportent des idées nouvelles et richesse à propos de la vie, la culture et l’art.

Salim Vally, le coordonateur de la recherche, a dit qu’il existait une autre raison intéressante d’accepter les jeunes refugiés : ils nous donnent la possibilité d’agir avec humanité. "Rappelez-vous que Einstein a été un refugié, et notre pays peut avoir affaire à quelques Einstein sans le savoir".

 Est-ce encore la xénophobie ?
Des menaces renouvelées et organisées contre les immigrants  durant près de deux semaines à Alexandria, à Johannesburg, soulignent l’urgence qu’il faut accorder aux liens que doivent entretenir les organisations de société civile sud-africaines et celles des migrants. C’est ce qu’ont déclaré les chercheurs récemment.

En octobre 2011, la police était en alerte suite à une tension ayant vu le jour à Alexandria [faubourg de Johannesburg] quand les locaux menaçaient et forçaient certains immigrants à déménager, les accusant d’occuper les habitations gouvernementales destinées aux citoyens sud-africains.

Les chercheurs disent que c’est l’échec des promesses faites à la classe moyenne  dans l’agenda socioéconomique du gouvernement et la pauvreté ambiante qui suscitent un ressentiment auprès des défavorisés. Et la xénophobie en est une des manifestations.

Cet échec contribuait à ce que les défavorisés locaux s’en prennent à ceux qui sont aussi des victimes et plus vulnérables qu’eux, ont dit les chercheurs. L’étude insiste sur le fait que la lutte pour un système d’éducation de qualité pour les sud-africains ne devrait pas ignorer les droits des migrants et refugiés.


Traduit de la deuxième partie l’article "Lifting the veil on migrants and myths" de Kathleen Chaykowski paru dans  " Mail & Guardian" de Johannesburg du 28/10/2011

mercredi 14 décembre 2011

Parvenir à une autre perception des migrants en Afrique du Sud




En 1999, deux jeunes guinéens, Yaguine  Koita (15) et Fode Tounkara (16), furent trouvés morts dans le train d’atterrissage d’un long courrier à l’aéroport de Bruxelles, en Belgique. Dans la poche de l’un d’eux, il y avait une note où était écrit ceci qui suit : “… Nous sollicitons votre solidarité … si vous nous voyez sacrifier et perdre ainsi nos vies, c’est à cause d’une trop grande souffrance....aidez-nous à faire face à la pauvreté et à la guerre…pardonnez-nous d’avoir eu l’audace de vous écrire cette lettre".

Les chercheurs du Centre pour les Droits d’Education et la Transformation de l’Université de Johannesburg avaient fait le choix de mettre un extrait de cette lettre en couverture de leur brochure parue en 2005 sur les droits à l’éducation des refugiés, demandeurs d’asile et migrants en Afrique du Sud. L’objectif visé à travers la publication était d’encourager une compréhension plus approfondie sur les immigrés mais aussi susciter plus de compassion à l’égard des difficultés auxquelles font face les migrants dans le pays.

Tout en tenant compte des travaux ultérieurs, les auteurs ont, après une année de recherche abouti à la conclusion selon laquelle la violation des droits à l’éducation des refugiés et migrants est très répandue en Afrique du Sud.
Mais l’étude fait aussi état d’une grande flexibilité des immigrants eux-mêmes. Pour preuve, elle passe en revue diverses initiatives émanant de différentes organisations des migrants sans oublier la coopération entre ces dernières avec leurs consœurs sud-africaines.

Cette recherche a été menée sur base des interviews d’élèves et des parents d’élèves conduits sur terrain dans trois zones différentes (milieux rural, urbain et des townships) dans les provinces de Gauteng, Limpopo et le Western Cape. Aux yeux des auteurs, cinq facteurs forment le goulot d’étranglement à la scolarisation des enfants des migrants en Afrique du Sud.

Ce sont respectivement le coût élevé de l’éducation, l’ignorance de la loi dans le chef des autorités tant scolaires qu’administratives, le manque de prise de droits à l’éducation par les migrants, l’absence des papiers et la xénophobie ou les pratiques discriminatoires dans les milieux scolaires.

Les sujets couverts par les témoignages récoltés par les chercheurs incluent l’accès aux services sociaux et à l’éducation, ils abordent les questions liées au rôle du rôle de l’homme et celui de la femme dans la société, sans omettre celui des mineurs non accompagnés et tous les facteurs qui empêchent les migrants de prendre une part active aux activités communautaires.

Résilience et solidarité
Etaient inclus dans les témoignages récoltés par les chercheurs des récits comme celui d’un jeune orphelin somalien de 17 ans qui dut traverser le Kenya et la Mozambique avant d’atteindre l’Afrique du Sud. Dans ses "Pérégrinations" il a reconnu qu’il existait à travers le continent africain un réseau basé sur la solidarité et non l’argent.

C’est dans la même veine que Mary Tal, immigrée camerounaise, a créé une association en 2007 qui vise à "préparer les femmes refugiées à s’adapter à la vie en Afrique du Sud", car selon beaucoup de ces femmes, "vivre en Afrique du Sud est un véritable enfer" confie Mary Tal. L’association en question a aidé beaucoup de femmes en leur fournissant l’information nécessaire  en vue de l’éducation de leurs enfants ainsi que leur accès dans les établissements scolaires.

Les chercheurs citent aussi le cas de Tante Zulekha, somalienne d’origine, qui a brisé les clichés habituels du rôle passif de la femme dans la société somalienne en se montrant une défenseure acharnée des droits à l’éducation tant des garçons que des filles  au sein de sa communauté.

Le rôle de plus en plus majeur que jouent les organisations sociales sud-africaines qui travaillent avec les migrants est mis en exergue par l’étude du Centre. Par exemple il y est question de Hlatshwayo Mokolo qui appartient au Kganga Consortium et est en même temps membre de l’Organge Farm water crisis committee. "Elle dirige aussi une crèche  dans l’Orange Farm qui a la particularité d’accepter tous les enfants, qu’ils soient porteurs des documents ou pas. Mentionner ce détail est important quand on se rappelle que l’absence du certificat de naissance est cité comme l’un des facteurs qui handicapent l’accès aux institutions d’enseignements scolaires ou préscolaires des migrants".

Hlatshwayo a ajouté que les écoles primaires de son voisinage acceptent les bulletins établis par sa crèche et les considèrent comme des documents valides. Cela signifie que les enfants migrants bénéficient de cette disposition étant donné qu’ils peuvent simplement présenter dans les écoles les bulletins de la crèche.

Les chercheurs ont présenté également le cas de l’Association des Somaliens d’Afrique du Sud au Migrant Health Forum qui regroupe les organisations d’assistance sociales sud-africaines et les organisations des migrants. "L’association des Somaliens a sollicité et obtenu que l’Anglais et l’éducation sur le IVH/SIDA soit dispensé aux membres de sa communauté".

 Le chercheur Kara Mackay pour sa part a fourni des exemples qui indiquent que les organisations de la Société Civile telles que People against Suffering, Oppression and Poverty et Agency for Refugee Skills and Advocacy s’efforcent de faire face à la situation là où la présence de l’Etat fait cruellement défaut.

La recherche effectuée par Sellaphi Sibanda dans la province de Limpopo a quant à elle mis a nu les cas des enfants mineurs utilisés dans les travaux des fermes ou domestique souvent non rémunéré et même à la prostitution. Cependant, il faudrait aussi souligner des initiatives positives comme le Children Committe de Musina qui aide les enfants immigrés à s’intégrer à la vie locale. A Cape Town, les chercheurs citent le cas du Children Ressource Centre qui éduque la population contre la xenophobie.


Ceci est une traduction de la première partie de l’article "Lifting the veil on migrants and myths" de Kathleen Chawkowski paru dans le "Mail & Guardian" de Johannesburg du 28/10/2011



vendredi 2 décembre 2011

Quand les Blancs Sud-Africains rentrent au bercail




Apres 10 ans passés à Londres, la petite famille a finalement fait ses valises et prit le chemin de Johannesburg, signe révélateur de ce que les experts perçoivent comme une tendance de plus en plus grandissante des Blancs Sud-Africains qui retournent au pays. "La vie à Londres n’était pas mal du tout, mais c’est toujours différent de chez-soi", déclare Julie Short, qui a rencontré son mari Wallis dans la capitale Britannique. C’est là aussi que naquirent leurs deux fillettes. Le couple était parmi les 800.000 Blancs sud-africains qui quittèrent leur pays dans les années allant de 1991 à 2001 pour s’expatrier pour la plupart vers la Grande-Bretagne, l’Australie ou la Nouvelle-Zélande.

L’exode s’était élevé jusqu'à représenter 15% de la population totale des Blancs dans le pays. Ce qu’ils fuyaient ce fut surtout la criminalité violente et gratuite si fréquente qui fit irruption dans le pays dans le milieu des années 1990. A peu près 27.000 personnes furent tuées au cours de la seule année 1995 qui vit l’arrivée au pouvoir de Nelson Mandela.

D’autres parmi eux ont pris peur que la nouvelle Afrique du Sud post-apartheid ne leur ferme la porte à l’emploi ou aux opportunités de faire des affaires, étant donné que le gouvernement s’était lancé alors dans la politique de responsabilisation des cadres Noirs (BEE) en vue de créer une classe moyenne parmi la majorité Noire. La priorité y était accordée aux seuls cadres Noirs longtemps négligés sous les différents régimes Blancs précédents. Mais à présent cet exode semble non seulement ralentir mais se renverser.

Les données du recensement indiquent que la population blanche en Afrique du Sud s’élève à 4,5 millions, chiffre jamais atteint depuis 1991. Cependant, le nombre exact des Blancs sudafricains vivant à l’extérieur du pays est difficile à déterminer parce que beaucoup d’entre eux détiennent la double nationalité et ne sont pas comptés parmi les immigrants dans leur nouvelle nation. Mais les experts estiment que la raison majeure de ce mouvement s’explique par le mauvais état des économies des pays riches.

"Nous savons que l’Europe est en crise et l’économie américaine s’est affaiblie aussi", nous a déclaré John Loos, économiste à First National Bank (FNB) de Johannesburg. "Ce qui implique que la plupart des pays dans lesquels les gens ont émigré en quittant l’Afrique du Sud ne se portent pas bien, et les perspectives d’emploi n’y sont pas par conséquent bonnes. Cela aussi est à la base du ralentissement du taux de l’émigration.  En contraste, l’économie sud-africaine se porte pour la première fois bien depuis l’arrivée au pouvoir du premier gouvernement inter-races en 1994", a conclu M. Loos.

Retour au bercail

L’Afrique du Sud a connu une récession en 2009 qui ne dura que 9 mois et qui s’est révélée plutôt mois dure que ce qui arriva au reste du monde riche. Bien que le chômage se soit stabilisé à environ 25% de la population active, la demande demeure forte pour les personnes disposant des capacités tels les médecins, infirmiers et ingénieurs. Le ministère de Travail estime qu’en 2008 le pays avait besoin de 913.000 de ces personnes ayant des "connaissances rares" pour combler la demande. 

C’est ce créneau qui constitue le marché de Homecoming Revolution, un site web qui s’est fixé pour objectif d’aider les sud-africains expatriés à bien manœuvrer la transition lorsqu’ils retournent chez-eux. "Nous nous focalisons sur les capacités rares en Afrique du Sud : médecins, infirmiers, comptables, ingénieurs informaticiens… Toutes les industries ont besoin d’une telle expertise et nous avons besoin du leadership et voulons que les gens les plus expérimentés viennent ici et aident à la création d’emploi pour renforcer l’économie du pays",  nous a déclaré Brigitte Britten-Kelly qui dirige le projet.

Ce fut le cas de Wallis Short, un ingénieur en informatique qui trouva rapidement un emploi dans une entreprise locale à son retour. Il nous a déclaré que pour les personnes ayant des capacités recherchées, les opportunités de travail abondent, malgré la crainte de certains Blancs Sudafricains de se voir délaissés au profit des Noirs dans le cadre de la politique gouvernementale de BEE (responsabilisation des cadres Noirs).
"J’étais toujours sûr que je finirai par trouver un emploi malgré le BEE" dit-il. "Mon créneau exige des gens expérimentés et vous ne pouvez pas combler ces vides avec des candidats qui en manquent", ajoute Wallis Short.
Il existe toujours une criminalité ambiante, en particulier autour de Johannesburg. Mais le crime violent du passé a décliné…. A peu près 16.000 personnes furent tuées l’an passé et la violence se concentre dans les townships pauvres où l’accès est difficile à la Police.
Dans les quartiers riches, les agents immobiliers avouent que de moins en moins de personnes vendent leur maison en vue d’émigrer. La famille Short quant à elle vient de rénover sa maison de Johannesburg qui dispose d’un splendide jardin et d’une piscine, beaucoup mieux que leurs 15 mètres carrés qu’ils partageaient à Londres, sans mentionner la présence presque permanente du soleil. "Ce n’était jamais la même qualité de vie que celle que vous pouvez trouver ici chez-nous", déclare Julie Short. "Nous apprécions beaucoup d’être chez-nous. C’est tout simplement formidable".


Traduit de l’article "White SA head for home" de Thomas Donzel paru dans le "Mail & Guardian" de Johannesburg du 20/11/2011


vendredi 25 novembre 2011

"Ce que je veux, ce ne sont pas des diplômes mais une attitude positive" !

A Londres, un homme d’affaires explique pourquoi il préfère donner du travail aux étrangers plutôt qu’à ses compatriotes.

Un rapport publié récemment par le Chartered Institute of Personal and Development de Londres déclare que les propriétaires d’entreprises Britanniques préfèrent employer des étrangers plutôt que des autochtones à cause de "l'attitude positive" des premiers. Le gouvernement de M. Cameron se dit "préoccupé" par les derniers chiffres du chômage dans le pays. D’après une source, "il est difficile dans les conditions actuelles de prévoir des reformes en vue du bien-être de la population lorsqu’il y a un tel afflux d’étrangers".



CHARLIE MULLINS, propriétaire de Pimlico Plumbers de Londres, a déclaré que "pour les jeunes Britanniques, il est préférable d’être footballeur et gagner ainsi beaucoup d’argent que s’esquinter au travail pendant toute la journée pour un salaire qu’ils jugent dérisoire". Le nombre d’employés étrangers de Pimlico Plumbers, leader Britannique de la plomberie a doublé "simplement à cause du manque d’une bonne éthique de travail de la part des candidats Britanniques". 


Agé de 52 ans, Charlie Mullins compte 200 membres de staff dans son entreprise. Il a reconnu qu’il trouve intéressant d’engager les étrangers puisqu’ils sont prêts a travailler dur, ce à quoi nombres de candidats Britanniques ne sont pas disposés. Le problème, dit-il ne consiste pas en la présence de personnes qui "ne peuvent pas travailler" mais plutôt qui "ne veulent pas travailler".


L’homme a informé le "Mail" que le nombre de travailleurs étrangers employés au sein de son entreprise a doublé au cours de deux dernières années, passant à 40 soit 20% du total. La majorité d’entre eux viennent d’Afrique du Sud et œuvrent comme plombiers ou comme négociants, travails qui conduisent à un salaire annuel de £ 50.000 ou £ 70.000.
Il a ajouté que ces étrangers veulent à tout prix augmenter leurs ressources et effectuent donc des heures supplémentaires. Il par contre dit que nombre d’autochtones qui sont passés aux interviews n’avaient pas une attitude positive et exigeaient un salaire très élevé. "Beaucoup de ces jeunes interviewés n’avaient jamais travaillés de leur vie. Mais beaucoup d’entre eux ont des diplômes d’université. Moi, je ne veux pas des gens bradés de diplômes mais une 
attitude positive".




KEITH ABEL, propriétaire de Organic Greengrocer, a été obligé de recourir aux étrangers puisqu’il avait du mal à trouver des jeunes Britanniques disposes à combler les places vacantes. D’après lui, les jeunes sont pris au pièges par les apparents avantages qu’offrent le système social et ainsi personne n’est prêt à se mettre debout tôt le matin pour un travail qui paie £ 7 l’heure quand on peut obtenir gratuitement l’aide gouvernementale. "Les gens semblent ne pas vouloir commencer par le travail qu’ils considèrent comme manuel. Et pourtant, Terry Leaky, le patron de Tesco, a bien commencé en fabriquant des étagères. Le début est toujours modeste".


"La vérité est que le travail le mieux rémunéré est donne a ceux qui commencent par le bas échelon. Mais il existe une sorte de résistance de la part des jeunes d’aujourd’hui de pouvoir commencer en bas et de progresser avec le temps", a-t-il déclaré.


Traduit de l’article "Meet the British bosses who say give us foreign workers every time" paru dans le "Mail" de Londres le 17/11/2011